Quotidien

50 jours et plus.

Voilà plus de 50 jours que nous sommes tous les 4 à la maison. J’aurais voulu écrire plus durant ce confinement. Mais j’ai manqué de jus. J’ai mis toute mon énergie à maintenir un rythme sain pour les filles, à faire l’école, à préparer des activités. Je tenu le coup au maximum pour qu’Antoine puisse avancer, travailler au mieux durant cette période chargée pour lui. J’ai mis toute mon énergie à ne pas trop penser, à anesthésier un peu mon cerveau pour survivre correctement, au jour le jour.

J’ai aimé le beau temps qui faisait garder le sourire. J’ai
observé chaque jour le cerisier des voisins, devenir blanc de fleurs, puis vert
de feuilles. J’ai vu les pétales s’envoler comme la neige dans les bourrasques.
Cet arbre est comme une sorte de boussole. Ma boussole du temps qui passe,
quand je ne sais plus quel jour nous sommes ni depuis combien de temps nous
sommes ici tous ensemble.

Depuis le début je n’ai pas compté les jours. Je les
découvre souvent sur Instagram en lisant les publications des unes et des
autres. Le cerisier est aujourd’hui couvert de grosses cerises vertes, je les
vois nettement de la terrasse, c’est dire si elles sont grosses.

Deux semaines de vacances se sont écoulées. Au début j’étais
soulagée de ne plus faire la classe. Mais là le manque de rythme se fait
sentir, et je suis soulagée de reprendre demain. Je ne saurai dire ce que l’on
a fait de ces deux semaines. Trainer ça c’est sûr. Il a plu, beaucoup,
tellement… trop. Encore une fois je regrette de n’avoir pas écrit un peu chaque
jour, pour garder une trace des toutes petites choses réalisées. Pas grand
chose c’est sûr, mais mieux que rien. Le grand soleil qui nous maintenait en
éveil a laissé place à l’orage qui gronde dehors. Et dedans aussi.

Allons-nous remettre les filles à l’école ?
Pourrais-je retravailler bientôt ?
Vais-je réussir à maintenir ma nouvelle petite entreprise ?
Et après ce sera comment ?
Est-ce une nouvelle vie à laquelle nous nous préparons, tout en faisant le deuil de l’ancienne ?
Que faire de toute cette colère, contre le gouvernement, la grande distribution, les grands qui s’enrichissent au détriment de la dignité humaine, comme d’habitude.
Que faire de toutes ces informations, de tous les témoignages, que faire des critiques et des encouragements ?
Que faire des espoirs de grands changements ?
Que faire des déceptions à venir, lorsque rien n’aura bougé, ou bien si peu ?

Comment continuer à naviguer droit devant, quand le
brouillard nous bouche la vie ?

C’est un bien drôle de printemps, où les distractions ne
compensent plus, où les jours sans prennent de plus en plus de place.

Après l’annonce d’Edouard Philippe, je n’ai plus eu envie de
rien. Plus envie de coudre. Plus envie de cuisiner. Plus envie de m’habiller.
Plus envie de me maquiller. Plus envie de faire une activité ou de jouer avec
les filles. Plus envie d’écrire ni de poster. Seulement l’envie de trainer,
avachie sur le canapé, le regard dans le vague.

Et puis il faut bien se relever, retaper les coussins,
replier le plaid. Faire à manger, laver du linge. Sortir les gosses des dessins
animés avant qu’elles ne finissent en crise d’épilepsie avec les yeux carrés.

On est bien tous les quatre, on s’aime si fort. On n’a pas
l’habitude d’être juste nous, notre entourage prend beaucoup de place dans le
quotidien hors confinement. Les amis, la famille nous manquent. Mais on est
bien tous les quatre et c’est déjà tellement précieux.

Dehors la pluie s’est arrêtée. Demain c’est la rentrée. Sur
la terrasse, le jasmin est en fleurs pour la première fois. Mon jasmin. Notre
jasmin. J’ai cueilli les dernières tulipes. Mes premières tulipes de ma vie,
plantées de mes mains. Malgré les araignées rouges qui grignotent, ça pousse.
Un peu comme la vie en ce moment finalement. Faudra voir à ne pas se laisser
trop envahir par ces saletés de parasites, histoire de ne pas se laisser sucer
l’énergie jusqu’à la sève.

Après-demain, la semaine prochaine, dans un mois ? Je ne sais pas. On verra.

Demain, déjà, c’est la rentrée.

9 Comments

  • Carmel
    3 mai 2020 at 20 h 05 min

    Les larmes aux yeux, en lisant tes mots. Car ils expriment parfaitement ce que je ressens.

    Reply
  • Julie
    3 mai 2020 at 20 h 09 min

    Ta justesse.
    Toujours.
    Bisous

    Reply
  • Angie
    3 mai 2020 at 20 h 21 min

    Très bel article, merci.
    La conclusion finale est la même à la maison, on fait au mieux, on s’aime, on aime nos enfants, notre maison, notre chien, notre jardin, on en sortira plus fort et un peu plus amoureux aussi ❤️

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  • odile
    3 mai 2020 at 20 h 52 min

    Merci pour ces mots posés…

    Reply
  • Maïté
    3 mai 2020 at 21 h 08 min

    Merci pour ce texte qui résonne si fort en moi et m’a tiré des sanglots, comme si tout ce qui est enfoui depuis plusieurs semaines pouvait enfin sortir.

    Reply
  • Joanna
    4 mai 2020 at 7 h 03 min

    Très beau texte. On ne sait pas de quoi sera fait demain, à quoi se préparer, ni même pour quand s’y préparer. Mais la vie continue avec les enfants, 1 pas devant l’autre, 1 jour après l’autre.

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  • Odile
    6 mai 2020 at 5 h 37 min

    Très beau texte, nous sommes tous plein de doutes sur demain, l’après confinement est bien angoissant.
    Bonne journée à vous.

    Reply
  • CT
    9 mai 2020 at 9 h 36 min

    Merci pour ce texte qui est un reflet de mes ressentis du moment, je trouve que vous êtes une maman douce et merveilleuse, j’aimerai avoir votre patience et votre créativité.

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    • mybrouhaha
      11 mai 2020 at 21 h 57 min

      Mille merci pour cotre commentaire si gentil ! J’aime ça et je profite malgré tout. Mais comme tout le monde je pousse régulièrement une bonne gueulante !

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